Avoir un diagnostic de TSA à l'âge adulte

Paru le 16 septembre 2015

Par Émilie Robert, conseillère d’orientation au Collège Montmorency
Auteure du livre Les personnes autistes et le choix professionnel – Les défis de l’intervention en orientation (2015), publié chez Septembre éditeur
 
De plus en plus d’adultes réalisent que plusieurs de leurs difficultés peuvent s’expliquer par le fait qu’ils ont un trouble du spectre de l’autisme (TSA). Ces dernières années, les médias se sont intéressés à quelques cas d’adultes ayant appris tardivement qu’ils étaient autistes, comme les cas du professeur et musicien Antoine Ouellette, ou celui du Dr Richard Le Blanc. Ces deux hommes ne sont pas des cas isolés. Que signifie un diagnostic de TSA, sur le plan professionnel?
 
Rappelons que le TSA, nouvelle appellation pour désigner l’ensemble des cas d’autisme, se caractérise par des difficultés dans la communication verbale et non verbale, par un déficit dans les interactions sociales, par des intérêts restreints, par des actions répétitives, par un attachement à une routine et par une sensibilité plus aigüe à certains stimuli comme les sons, les odeurs ou les textures.
 

Que faire lorsqu’on soupçonne que l’on a un TSA?

Souvent, les adultes qui viennent à se demander s’ils ont un TSA ont vécu plusieurs embuches et difficultés dans leurs relations familiales ou amoureuses, dans leur vie scolaire ou dans le monde du travail. C’est souvent après avoir tenté différentes solutions ou après avoir vécu une période de crise ou de dépression que ces adultes se reconnaissent enfin en lisant la description du TSA ou une biographie d’une personne autiste.
 
Ces personnes ont intérêt à en parler à leur médecin généraliste afin d’obtenir une ordonnance pour une évaluation. Même si peu de psychiatres et de neuropsychologues sont disponibles pour évaluer l’autisme chez les adultes au Québec, il existe des cliniques et des hôpitaux qui offrent ce service.
 
S’il y a plusieurs avantages à obtenir un diagnostic, ce processus peut tout de même s’avérer long et souvent couteux si l’on doit consulter en clinique privée. De plus, le diagnostic ne changera pas la personne ni ne règlera ses problèmes. Toutefois, plusieurs personnes autistes disent avoir ressenti un énorme soulagement de pouvoir enfin comprendre ce qui les distinguait des autres. Elles ne sont pas des extraterrestres. C’est la façon dont leur cerveau s’est développé qui explique bon nombre de leurs comportements. D’apprendre cette nouvelle est un moment déculpabilisant pour plusieurs.  

Doit-on en parler à son employeur?

Une fois que l’adulte sait qu’il a un TSA, à qui doit-il en parler? Cette question est bien sûr très personnelle. Toutefois, les adultes chez qui on décerne tardivement un diagnostic de TSA racontent souvent avoir eu plusieurs problèmes à maintenir un emploi ou à obtenir des promotions. Plusieurs disent avoir eu des conflits avec des collègues, des clients ou leur patron. Souvent, ces conflits émanaient de plaintes à propos d’une rigidité trop importante, d’un manque d’empathie ou de compréhension des autres, d’une excentricité ou d’une difficulté à se conformer à certaines exigences de l’employeur.
 
Si cette personne avait pu expliquer que sa rigidité est l’expression de sa manière d’organiser l’information ou de gérer son anxiété, que ses excentricités sont plutôt un besoin d’amoindrir les effets d’être trop sensible aux bruits, au toucher ou à la lumière, que sa routine lui permet de se repérer et d’épargner de l’énergie, peut-être que bien des conflits auraient pu être résolus. De comprendre le pourquoi des choses permet non pas de les justifier, mais d’avoir une piste pour trouver des solutions.  

Comment parler de son TSA à son employeur?

Comme c’est le cas pour toute question personnelle que l’on veut aborder avec son patron, il est préférable de demander à ce dernier d’avoir une rencontre en privé. Tout dépendant de la culture de l’entreprise, il peut être utile d’avoir en main le diagnostic du médecin afin de pouvoir donner des informations précises.
 
L’important est d’abord de rappeler à l’employeur ce qu’on aime dans notre travail et en quoi on est qualifié pour le faire. Ensuite, il est gagnant de présenter qu’il existe une explication médicale à certains comportements qui ont pu être observés. Avoir un diagnostic ne veut pas dire que la personne va changer, et ce n’est pas ce qui est souhaité. L’objectif de cette discussion avec l’employeur est de pouvoir expliquer de façon objective certains besoins et comportements et d’ouvrir le dialogue sur des accommodements possibles, si cela est pertinent. Par exemple : « Si j’arrive tard le matin, c’est que je souffre d’insomnie, typique chez les personnes ayant un TSA. Si l’on peut aménager mon horaire pour que je puisse commencer ma journée de travail plus tard, cela hausserait ma productivité ».
 
Les personnes ayant un TSA sont toutes uniques et différentes. Toutefois, elles ont toutes en commun d’avoir des difficultés à communiquer avec les autres. L’obtention d’un diagnostic est un outil, un levier, qui peut les aider à parler d’elles-mêmes et de leurs besoins. Cela aide aussi à mieux faire connaitre les multiples visages du TSA.