70 000, ça fait beaucoup!

Paru le 16 février 2022

Par Pierre Côté, président et fondateur de l’Indice relatif de bonheur

 

70 000.

 

À quoi peut bien correspondre ce chiffre qui semble sorti de nulle part? Ajoutons-y une information pour dissiper un peu le mystère.

 

70 000... heures.

 

 

Ah! Vos neurones sont en mode recherche. Ils vous suggèrent certaines pistes, mais la réponse ne coule pas de source. Ajoutons alors une dernière information.

 

70 000 heures... de travail.

 

Voilà! Dans une vie active, c’est plus ou moins le temps qu’une personne passera au travail, à raison de trente-cinq heures par semaine pendant quarante ans. Difficile de penser que la qualité de ces heures passées au travail n’affectera pas notre niveau de bonheur au travail, bien sûr, mais aussi de bonheur dans notre vie personnelle.

 

L’impact du travail sur notre bonheur

Durant toutes nos années de vie active (ou vie « productive »), nous passerons presqu’autant d’heures à travailler qu’à dormir ainsi que de temps passé avec nos proches. La relation que l’on entretiendra avec eux sera influencée par ce que nous vivrons au travail, en plus de l’impact d’un sommeil déficient parce que, justement, notre travail et ce qui s’y passe nous taraudent l’esprit, souvent la nuit!

 

L’impact du travail sur notre vie et sur notre bonheur est immense. Il constitue d’ailleurs le 3e des 25 facteurs d’influence du bonheur de l’Indice de bonheur Léger (IBL), mais on essaie encore trop souvent de le minimiser. On considère le travail comme quelque chose avec lequel tous et chacun doit composer, « faire avec », comme on dit. En fait, nous sommes prêts à accepter de plus larges compromis dans notre travail que nous ne serions jamais disposés à faire dans notre vie de couple, dans notre vie familiale ou encore dans notre vie sociale.

 

Cultiver le bonheur au travail

Actuellement, le bonheur au travail, on aime surtout en parler. C’est déjà ça. Mais se donne-t-on toutes les chances de le faire croitre? Les employés comme les employeurs? Notre relation avec le travail a changé radicalement depuis vingt ans. Si on se fie à la façon dont les plus jeunes le perçoivent et à quoi ils l’associent, c’est loin d’être fini. Sans parler de la notion de télétravail, maintenant bien implantée.

 

Toutes les données cumulées depuis 15 ans par l’IBL vont dans le même sens et ne laissent aucun doute sur l’impact de notre travail sur notre bonheur. Je ne ferai référence ici qu’au palmarès des professions et métiers les plus heureux que l’IBL publie tous les deux ans. Ce dernier fait ressortir de façon tellement évidente l’importance de faire un travail que l’on aime et de se donner toutes les chances pour l’exercer. Je ne peux m’empêcher de penser aux plus jeunes et à leurs études, au fait de s’accrocher pour obtenir une formation qui leur permettra de faire un boulot dans lequel ils se plaisent.  Le but de faire ces études, quelles qu’elles soient, est surtout de se donner l’opportunité de choisir un travail plutôt que de le subir. Entre l’un et l’autre, il existe une différence immense qui nous définit et qui nous accompagne toute notre vie. Pensez-y! 70 000 heures, c’est long! Dans ce palmarès, ce sont les travailleurs occupant des emplois non spécialisés ou peu spécialisés, des emplois qui ne demandent pas de formation, qui occupent les derniers rangs... et qui sont aussi les moins heureux du point de vue personnel. Le graphique suivant ne pourrait être plus éloquent.

J’aimerais tant que les jeunes, les décrocheurs surtout, le comprennent et le réalisent, parce qu’une fois embarqués dans le « système », une fois que la roue du travail se sera mise à tourner avec tout ce qu’elle apporte et comporte (argent, dépenses, auto, maison, enfants, dettes, obligations, pressions, etc.), il sera bien difficile d’en sortir pour aller chercher une formation qui leur permettra de se réaliser et d’évoluer dans un domaine qui les allumera. Sortir de cette roue qui broie tout demande une tonne de courage et de détermination et souvent, ces deux attributs ne s’avèrent pas suffisants.

 

Pour conclure cet article, j’aimerais toutefois exprimer une nuance importante. S’il est vrai et fondamental que nous devons faire idéalement un travail que l’on aime, il est aussi essentiel d’aimer le travail que l’on fait. Je ne parle pas ici de résignation pour un travail qui ne nous plait pas, mais de conditionnement minimal et de marge de manœuvre pour se laisser séduire par son travail. Rien n’arrive sans effort, et parfois, ces derniers suffiront à faire pencher la balance du côté positif des choses.

 

Quoi qu’il en soit et peu importe la façon dont vous vous y prendrez, ne vous leurrez pas. Votre travail vous suivra toute votre vie. Faites en sorte qu’il vous plaise.

 

Cet article est tiré du livre  Souriez, vous êtes au travail publié chez Septembre éditeur.